Kingsman : Services Secrets

En l’espace de quelques films, le réalisateur anglais Matthew Vaughn aura réussi à imprimer sa patte personnelle sur le cinéma de genre hollywoodien, et notamment dans le genre désormais ultra codé et calibré qu’est le film de super-héros. Pourtant, avec  Kick-Ass, et X-Men - Le Commencement, le cinéaste parvenait à imposer son style et sa vision aux deux projets, pour livrer deux films qui parvenaient à se démarquer de la concurrence, malgré le cahier des charges lourd des studios (surtout pour la franchise des mutants). Deux vrais rafraichissements, surtout à une période et dans un genre où tous les films se ressemblent de plus en plus, toutes les productions Marvel étant construites sur le même mode de fonctionnement (depuis Avengers, tous les Marvel doivent lui ressembler), et tous les autres blockbusters (sauf exceptions bien précises) étant pompées sur The Dark Knight, avec une soi-disant noirceur et le trauma du héros obligatoire.

Alors qu’il était parti pour réaliser X-Men Days of future Past (finalement repris par Bryan Singer), Vaughn s’est finalement tourné vers un autre projet, développé avec sa co-scénariste Jane Goldman, à savoir l’adaptation du comic book The Secret Service de Mark Millar et Dave Gibbons. La note d’intention du réalisateur est claire, il voulait livrer avec ce film une version post-moderne des films d’espionnage des années 60 et 70, les James Bond époque Sean Connery et Roger Moore, et la trilogie Harry Palmer (incarné par…Michael Caine, sa présence au casting n’y est surement pas étrangère), c’est-à-dire revenir à un cinéma d’espionnage avant tout fun et décomplexé, et livrer une alternative au genre actuel, incarné par Jason Bourne et le James Bond version Daniel Craig, jugés trop sérieux par Vaughn.

Ainsi, en adaptant le comic book de Millar et Gibbons, le réalisateur de Layer Cake développe une pure histoire d’espionnage, tout en la mêlant à un récit initiatique. Il s’agit de l’histoire de Galahad (Colin Firth), agent secret pour les Kingsmen, qui va prendre sous son aile Eggsy (Taron Edgerton) un jeune délinquant des quartiers pauvres de Londres, dont le père était lui-même un agent de l’organisation, et qui est mort au cours d’une mission, se sacrifiant pour sauver Galahad.  Le jeune homme va donc suivre une formation intensive et dangereuse (qui peut lui coûter la vie), en concurrence avec d’autres personnes de sa tranche d’âge, dans le but d’intégrer l’organisation. En mettant en scène cette histoire de formation, Vaughn prend le risque d’emprunter des codes et une structure qu’il utilisait déjà lors de ses deux précédents métrages. Ceux qui ont vu Kick-Ass et X-Men – Le Commencement seront donc en terrain connu, que ce soit au niveau du déroulement de l’intrigue, de la caractérisation des personnages, de situations, voire même de la façon de filmer certaines scènes d’action, notamment avec l’utilisation de la vue subjective. On peut ainsi regretter un manque d’audace narratif, et une forme de répétition de la part du cinéaste, la première partie du film ne réservant guère de surprises pour les habitués de sa filmographie.

Mais il faut bien admettre que cette légère déception n’entache en rien la vision de ce Kingsman, à la vue du spectacle proposé, et surtout de la façon qu’il a de se démarquer de la majorité des blockbusters actuels tout en allant piocher dans la nostalgie de son spectateur. Vaughn se réapproprie en effet tous les codes habituels des James Bond pour les détourner à sa façon. Le méchant mégalomane interprété par Samuel L. Jackson, sorte de jumeau de Steve Jobs, lui permet de brocarder l’asservissement des masses à travers le plan machiavélique concocté par ce dernier, à savoir fabriquer et distribuer gratuitement au monde une puce pour Smartphones qui, une fois activée, va décupler leur agressivité et va les faire s’entretuer. Le repère de ce dernier (dont la structure et la taille font penser au travail de Ken Adam, décorateur historique de la saga James Bond) où vont se réunir les 1% les plus riches de la planète lui permet de mettre en scène la lutte des classes existant aujourd’hui, les riches étant réunis pour échapper à cette « fin de l’humanité » (mais le réalisateur va leur réserver un sort inattendu et hilarant), lutte que l’on peut voir également lors de la formation du jeune Eggsy, ce dernier se retrouvant moqué par les autres postulants (tous des bourges fils à papa) car il ne sort pas de grandes écoles comme Oxford ou Cambridge. On retrouve aussi les fondamentaux de la saga 007, tels que les gadgets sophistiqués, le flegme britannique des agents, le final plein d’explosions, ou encore la princesse que le héros va devoir sauver et qui se retrouvera dans ses bras une fois que ce sera fait (et qui lui indique avant qu’il pourra y aller par les fesses s’il sauve le monde).

Mais au-delà de ce côté à la fois nostalgique et moderne, c’est surtout le spectacle proposé par le réalisateur qui rend le film si rafraîchissant. Si ce dernier propose les passages obligés du récit type d’espionnage, son exécution délirante et inventive rend le film unique dans le film de genre actuel. Les spectateurs  se souviendront principalement du passage dans l’église, à savoir une scène de massacre d’anthologie, filmée dans un plan séquence rappelant celui de Kick-Ass (où Nicolas Cage abattait au shotgun plusieurs bad guys dans un entrepôt), et qui permet à Matthew Vaughn de réaliser l’une des meilleures scènes d’action de ces dernières années, totalement décomplexée (Colin Firth dégomme des dames âgées en pleine tête, se bat avec des planches en bois, un couteau et même une hache), dynamique et réellement jouissive. Des passages aussi inattendus et spectaculaires, ce Kingsman : Services secrets en regorge, et malgré ses quelques défauts, on ne peut que saluer et se faire plaisir devant un spectacle qui tient ses promesses, ne prend pas son spectateur pour un idiot, et a le mérite de se démarquer des blockbusters actuels, qui se ressemblent de plus en plus. En tout cas, avec des réalisateurs comme Mattehew Vaugn et Edgar Wright, le cinéma britannique a de beaux jours devant lui.

Kingsman : Services Secrets - Affiche
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Kingsman : Services Secrets

Sortie cinéma : 18 février 2015
Un film de : Productions :
20th Century Fox
Scénario : Avec : Durée :
02h09

Compositeur :
Budget : ---
Box-office mondial : ---
Classification :
Titre original :
Kingsman : The Secret Services

Saga : ---

KINGSMAN, l’élite du renseignement britannique en costumes trois pièces, est à la recherche de sang neuf. Pour recruter leur nouvel agent secret, elle doit faire subir un entrainement de haut vol à de jeunes privilégiés aspirant au job rêvé. L’un d’eux semble être le candidat « imparfaitement idéal » : un jeune homme impertinent de la banlieue londonienne nommé Eggsy. Ces super-espions parviendront-ils à contrer la terrible menace que fait peser sur le monde l’esprit torturé du criminel Richmond Valentine, génie de la technologie?

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