Critique du film "Jurassic World"

Les dinosaures sont-ils encore capables d’attirer le public en masse ? C’est la question fondamentale posée par Jurassic World. Plus de 20 ans après Jurassic Park, la franchise initiée par Steven Spielberg tente le come-back anachronique. Verdict.

Depuis l’officialisation d’un projet qui pataugeait depuis plusieurs années, Jurassic World s’annonçait comme un produit d’exécutifs menés par un opportunisme dont notre époque a le secret. Dans une année marquant le retour de Star Wars, Terminator et Mad Max, au cours d’une décennie dominée par les super-slips, les dinos partaient vaincus. Un fait dont Colin Trevorrow, jeune réalisateur issus de l’indépendant, et Steven Spielberg s’emparent consciemment pour nourrir leur blockbuster d’un discours méta assumé. En 1993, Jurassic Park jouait déjà la carte de la mise en abyme, à coup de faux merchandising et de double discours (« J’ai dépensé sans compter »). Rien de plus normal à retrouver cette ambivalence, ici transformée en moteur narratif.

Si le film de Steven Spielberg affichait déjà ce cynisme vis à vis de l’industrie, il évitait adroitement le raccourci facile du « c’était mieux avant ». Hélas, c’est ici que se situe le principal problème de Jurassic World : A trop regarder vers le passé, il prend des atours de pur fan-film. Des clins d’oeil essentiellement disséminés dans la première partie, à un rythme métronomique. Des mouvements de caméra identiques à la composition des cadres similaires, Trevorrow tente le jeu des sept erreurs. C’est parfaitement exécuté, mais tristement lassant.

Heureusement, le script d’Amanda Silver et Rick Jaffa parvient à se nourrir de cet effet de déjà-vu pour jouer avec les attentes du spectateur. La mise en place, finalement très rapide, laisse apparaître un cruel jeu de massacre prenant des directions pour le moins inattendues. L’Indominus Rex, dinosaure hybride conçu pour surprendre un public lassé, et le dressage de Raptors : deux des idées mises en avant dans la promo et qui pouvaient laisser perplexe. Au final, la sobriété de Trevorrow permet à ces instants très Z de fonctionner admirablement. Les dinosaures n’avaient d’ailleurs jamais eu autant d'importance. Le réalisateur leur apporte une dimension humaine surprenante, qui pourrait faire grincer des dents, mais s’avère finalement cohérente avec la direction prise par le précédent épisode. Tout cela menant vers un final absolument jouissif, assumant totalement sa dimension de monster-movie pour notre plus grand plaisir.

Il est donc dommage que le jeune cinéaste hésite tant entre déférence et nouveauté, puisque ces dernières sont les plus belles réussites du film. Jurassic World aurait évidemment gagné à se détacher encore plus de son modèle pour trouver sa propre voie. On se satisfera cependant de voir, en 2015, un blockbuster aussi concis et direct dans sa narration. D'ailleurs, même si des suites ont été annoncé, il ne fait pas l’erreur d’une fin ouverte. Un film conçu comme une oeuvre unique et non comme une succession d'épisodes dont il serait le pilote ? Steven Spielberg, en bon producteur, a préféré l’unité d’une histoire qui se tient à la tentation d’un cliffhanger lucratif. Et on ne lui en remerciera jamais assez !

Au milieu de tout ça, l’excellent casting achève de nous faire adhérer. Chris Pratt, dont on craignait une redite avec Star-Lord, étonne par son charisme et sa retenue. Un personnage seulement esquissé qui se retrouve glorifié par hasard, loin du héros attendu ou de l’anti-héros facile. A ses cotés, Bryce Dallas Howard en impose malgré les stéréotypes qui auraient pu achever son personnage. Forte et entreprenante, elle confirme la dimension active des protagonistes. Il en est de même pour les deux enfants, débrouillards et finalement attachants, qui savent faire preuve d’initiatives bienvenues. C’est bien ce qui qualifie le film, qui n’hésite jamais à emprunter des chemins qu’on croyait balisés (Vincent D’Onofrio), mais rendus efficaces par le talent de ses instigateurs. Même le personnage d’Omar Sy parvient à éviter les pièges qui se tendaient à lui, dans un rôle de faire-valoir pourtant pas évident.

Au final, Jurassic World parvient à s’imposer comme l’un des blockbusters les plus honnêtes de l’année. Durant plus de deux heures au rythme soutenu, il se dévoile comme un travail d’artisan honorable, non dénué de défauts mais façonné avec le coeur. Il est à l'image de la partition encore une fois enlevée de Michael Giacchino, décidément de tous les bons coups cette année : entre hommage peut être trop évident et jolies prises d’initiatives. Un raffraichissement certain, entre grandes oeuvres d'auteurs (Mad Max, Tomorrowland) et divertissements abrutissants (Fast & Furious 7, Avengers 2). La balance ne serait-elle pas entrain de pencher ?

Jurassic World - Affiche
5 / 5
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Critique du film "Jurassic World"

Sortie cinéma : 10 juin 2015
Un film de : Productions :
Universal Pictures
Scénario : Avec : Durée :
02h04

Compositeur :
Budget : ---
Box-office mondial : ---
Classification : ---
Titre original :
Jurassic World

Saga :

L'Indominus Rex, un dinosaure génétiquement modifié, pure création de la scientifique Claire Dearing, sème la terreur dans le fameux parc d'attraction. Les espoirs de mettre fin à cette menace reptilienne se portent alors sur le dresseur de raptors Owen Grady et sa cool attitude.

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