Critique du film "Interstellar"

En l’espace d’une décennie, Christopher Nolan a remodelé malgré lui l’imagerie du blockbuster. S’imposant aux yeux du public comme l’un des rares « auteurs » de cette industrie, chacun de ses films est parvenu à cultiver une attente inouïe l'ayant plaçant d’office dans une position délicate. Après avoir redonné ses lettres de noblesse au film du super-héros, Interstellar marquait pour le cinéaste une nouvelle étape à atteindre pour s’émanciper d’une imagerie trop prégnante.

En ayant récupéré un script écrit par son frère et initialement porté par Steven Spielberg lui-même, Nolan avait crée la curiosité. Le voir marcher sur les traces du plus illustre entertainer qu’Hollywood n’ait jamais conçu désarçonne, tant les deux personnalités semblaient muent par des directives différentes. Hormis cette soif du contrôle qui les caractérisent, le réalisateur de Jurassic Park s’est forgé une réputation de grand naïf gérant parfois mal les percées lacrymales tandis que le réalisateur du Prestige est marqué par cette absence d’émotion, cette froideur maladive reflétée par les tons bleutées dominant jusqu'alors sa petite filmographie. Là où le premier s’est établit en tant que metteur en scène de l’image, le second s’est illustré comme un homme de mots. Un sensoriel face à un cérébral, en somme.

Pourtant, dès les premiers instants d’Interstellar, cette filiation qui semblait si lointaine éclate aux yeux. Au détour d’une poursuite d’un drone en famille (ironiquement la plus belle scène du film), Nolan évoque plus que jamais le cinéma de Spielberg. Affichant une croyance inébranlable en son récit, Nolan touche au plus profond du coeur. Il s’expose aussi à laisser apparaître ses failles et ses faiblesses. Durant tout le récit, c’est cette émotion sincère qui dévorera l’image. S’étant séparé de son chef-opérateur habituel, parti "transcender" de nouveaux horizons, il s’adjoint les services de Hoyte Van Hoytema (Her, La Taupe, Morse). Ce dernier apporte une dimension inédite au cinéma de Nolan, ajoutant cette patine organique qui manquait cruellement à cet amoureux de la pellicule. Se laissant enfin aller à de la mise en scène pure, le réalisateur de Mémento prend enfin conscience de la force que peuvent procurer des images. Enveloppé par la partition d’un Zimmer plus qu’inspiré, évoquant un hymne funèbre exaltant, Interstellar flatte la rétine parce qu’il cultive une force d’évocation que le cinéaste n’avait pourtant jamais démontré.

Le film est intégralement porté par un Matthew McConaughey de tous les plans, personnage Nolanien en diable dans son obsession et qui n’est pas sans rappeler le Richard Dreyfuss de Rencontre du Troisième Type. Hélas, il est peut être le seul personnage à réellement exister, les seconds rôles apparaissants parfois comme de simple instruments de scénariste. Brandissant leurs tirades bien (trop) écrites, ils ne parviennent presque jamais à sortir de leur rôle de figures fonctionnelles, excepté peut être lorsqu’ils se laissent aller à libérer leurs émotions. De ces instants douloureux, Interstellar tire sa force. Hélas, encore une fois, ils ne peuvent cacher la faiblesse d’un scripte qui peine à vraiment surprendre. Entre passages obligés, raccourcis flagrants et dialogues sur-explicatifs, le film ne parvient jamais à emmener le spectateur vers des horizons inattendus, comme encore bloqué par des fantômes du passé empêchant le cinéaste de prendre son envol. 

Des imperfections qui pourtant n’entachent en rien la puissance fulgurante d’un film plus d’une fois bouleversant. Animé par une soif de vie terrassante, un « instinct de survie », Interstellar touche en plein coeur. Evoquant les plus grandes épopées, ces 2h50 sentent le grand cinéma. Comme si Nolan assumait enfin son statut de story-teller, mettant en stand-by ses volontés didactiques pour se laisser porter par son coeur. Il y a deux ans encore, un tel petit miracle paraissant impensable.

Interstellar - Affiche
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Critique du film "Interstellar"

Sortie cinéma : 05 novembre 2014
Un film de : Productions :
Paramount Pictures, Warner Bros. Pictures
Scénario : Avec : Durée :
02h49

Compositeur :
Budget : ---
Box-office mondial : ---
Classification : ---
Titre original :
Interstellar

Saga : ---

Situé dans le futur, le film raconte comment le changement climatique a bouleversé l'agriculture, ne laissant que le maïs comme seule culture viable. Les scientifiques embarquent pour un voyage à travers un tunnel cosmique à la recherche d'un lieu où d'autres ressources pourront être cultivées

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